American
Speaking-Telephone Company
American Speaking-Telephone Company que
l'on peut traduire : La Compagnie de téléphone parlant
américaine
Cette société fut créée par un accord du
17 novembre 1877 visant à combiner les intérêts
dans les brevets téléphoniques d'Edison, contrôlés
par la Gold and Stock Telegraph Company,
filiale de Western Union, avec ceux dans
les brevets téléphoniques d'Elisha Gray, contrôlés
par la Harmonic Telegraph Company.
Gold and Stock obtint le droit exclusif de fabriquer, vendre et louer
les appareils téléphoniques protégés par
ces brevets.
La nouvelle entreprise employa Thomas A. Edison, Elisha Gray et Amos
F. Dolbear, trois inventeurs majeurs de l'électricité.
Début 1877 les dirigeants de la Western
Union Telegraph Company se rendent compte que
Bell en inventant le téléphone, avait créé
un nouveau marché, dont il s'agissait de ne pas perdre la maîtrise.
La western Union prospecta les chercheurs succcéptibles de lui
fournir un autre appareil téléphonique que celui construit
par Bell. Pour ce faire, elle s'adressa aux laboratoirs Edison qui se
mirent aussitôt au travail.
Western Union décida donc de concurrencer Bell et lança
la production commerciale de téléphones.
Un litige éclata en septembre lorsque la Bell Company intenta
un procès contre Western Union pour protéger ses brevets.
Western Union prétendait que c'était Gray, et non Bell,
qui avait inventé le téléphone. Cependant, Bell
ayant déposé ses brevets avant Gray, bien que de quelques
heures seulement.
Le 18 avril 1877, ces recherches aboutirent à la mise
au point d'un émetteur téléphonique à la
plombagine,
Thomas Edison brevete un émetteur
similaire, ou microphone, ce qui entrainera une certaine
controverse ( à savoir à qui doit être attribué
l'invention du microphone.)
D'une manière empirique, l'équipe Edison avait en effet
découvert que la résistance électrique de la plombagine
variait en raison inverse de la pression à laquelle elle était
soumise. Une pastille de plombagine intercalée derrière
la membrane vibrante d'un émetteur téléphonique
permettait donc de moduler un courant électrique, en fait Edison
avait inventé le microphone qu'il perfectionna par la suite en
remplaçant la plombagine par du charbon en poudre.
IL est très similaire aux microphones conçus par David
Edward Hughes
qui restera officielemnt l'inventeur du microphone à charbon.
La décision dEdison dutiliser le carbone sappuie
sur ses efforts pour comprendre les subtilités du des câbles
du télégraphe quil a vu en Angleterre en 1873. Afin
de mener des expériences en laboratoire, il construit des câbles
artificiels utilisant des rhéostats à haute résistance
constitués de tubes de verre remplis de carbone. Il a constaté
que ses câbles artificiels n'étaient pas fiables car la
résistance du carbone variait en raison du bruit et du mouvement,
mais ce type de résistance variable sensible était exactement
ce dont il avait besoin pour le téléphone.
Le 6 décembre 1877, Western Union fonda
l'American Speaking Telephone Company (ASTC), dont George
Walker était le président et Orton le directeur.
Ils utilisèrent des concepts créés par plusieurs
inventeurs, dont leur fournisseur Gray, Amos Dolbear et George Phelps,
afin de contourner le brevet de Bell. De plus, ils jouèrent un
rôle crucial en acquérant le brevet de Thomas Edison pour
un téléphone à charbon, aujourd'hui connu sous
le nom de microphone à charbon.
À la fin de 1877, Edison avait donc conçu un émetteur
dans lequel un petit bouton de carbone noir de fumée était
placé sous le diaphragme de l'émetteur.

De plus Edison avait compris que le téléphone
devait communiquer à grande distance, ce que ne faisait pas le
système Bell, alors il employa l'énergie de "la pile"
et conçu aussi un système à variation de résistance
.  
Le 19 décembre 1877 Edison dépose un brevet à
Paris no 121 687 pour "des perfectionnements dans les instruments
pour contrôler par le son, la transmission des courants électriques
et de la reproduction des sons correspondants au lointain" .
Début 1878 Western Union évalua l'émetteur
téléphonique à carbone d'Edison lors d'un essai
entre New York et Philadelphie.
Charles Batchelor, principal assistant d'Edison, était présent
à Philadelphie. À New York, William Orton (président
de la Western Union), Thomas Edison et George Phelps étaient
présents. Il fut établi que le téléphone
à carbone d'Edison était supérieur au téléphone
magnétique comme émetteur et devint ainsi l'émetteur
standard utilisé par Western Union. Le récepteur couramment
utilisé était le téléphone à couronne
unique de Phelps, illustré à droite.
Western Union commercialisait ses téléphones par l'intermédiaire
de ses filiales : l'American Speaking Telephone
Company et la Gold and Stock Telegraph
Company. Elles vendaient des téléphones utilisant
le téléphone à carbone d'Edison comme émetteur,
couplé au téléphone à couronne unique de
Phelps comme récepteur. Le téléphone de
Gray était également couplé à l'émetteur
d'Edison. L'usine new-yorkaise de Western Union, dirigée par
Phelps, fabriquait des appareils télégraphiques et téléphoniques
de 1877 à 1879.
Deux exemples de téléphones fabriqués par Phelps
dans son usine sont présentés ci-dessous, illustrant les
combinaisons Edison/Phelps. Les boutons en carbone utilisés dans
la fabrication des émetteurs d'Edison étaient fournis
à Phelps directement par Edison depuis Menlo Park. Fin 1879,
Western Union et Bell ont conclu un accord à l'amiable concernant
une action en contrefaçon de brevet intentée par Bell.
À l'issue de cet accord, Western Union a vendu à Bell
ses centraux téléphoniques dans 55 villes et 56 000
téléphones d'abonnés.
Les deux téléphones ci-dessous intègrent les inventions
d'Edison et de Phelps.
A gauche une publicité de la Gold and Stock Telegraph Co. de
1878. Tous les appareils téléphoniques présentés
dans cette publicité, à l'exception du bipolaire d'Elisha
Gray, furent fabriqués à l'usine Phelps/Western Union.

Après avoir testé des téléphones sur ses
propres lignes télégraphiques reliant New York, Washington
et Philadelphie, l'ASTC inaugura son premier central téléphonique
dans les bureaux de Western Union à New York le 1er août
1878.
Le premier central téléphonique d'une grande ville américaine
fut inauguré à San Francisco par la Gold and Stock Telegraph
Company en février 1878. Les appareils choisis furent le téléphone
à carbone Edison et le téléphone Phelps Crown.

Employés du premier central téléphonique de New
York (à droite et à gauche). Un appareil téléphonique
équipé d'un émetteur Edison et d'un récepteur
Phelps (au centre).
L'entreprise de Bell traversait alors une période difficile.
Western Union disposait d'un vaste réseau de lignes de communication
reliant les villes, du microphone Edison pour une transmission sonore
améliorée, d'une solide équipe d'agents prêts
à commercialiser ses équipements et d'une clientèle
avide d'achats. Bell ne disposant que de ses brevets, il n'avait d'autre
choix que de s'appuyer sur eux.
Le 12 septembre 1878, la National Bell Telephone
Company (NBTC) intenta une action en justice contre l'ASTC pour contrefaçon
de brevet. La procédure judiciaire dura plus d'un an, jusqu'à
ce que l'avocat principal de Western Union, George Gifford, soit finalement
convaincu que prolonger le litige équivalait à une perte
de temps et d'argent. De plus, l'entreprise avait réalisé
qu'en raison de contraintes techniques, les téléphones
n'étaient pas aussi performants sur les lignes télégraphiques
qu'elle l'espérait. Les parties entamèrent des négociations
pour un accord.
Un comité composé de six personnes
(trois de chaque côté) délibéra sur les termes
de l'accord pendant plusieurs mois.
Le litige fut finalement réglé le 10 décembre 1879.
Western Union vendit ses réseaux téléphoniques,
qui comptaient 56 000 abonnés répartis dans 55 villes
américaines, à l'entreprise de Bell. De plus, la société
reconnut officiellement Bell comme l'inventeur du téléphone
et refusa de cautionner les affirmations de Gray.
La National Bell Telephone Company a fusionné avec l'American
Speaking Telephone Company le 20 mars 1880 pour former l' American
Bell Telephone Company , également de Boston, Massachusetts,
au sein de laquelle Thomas Edison travaille à la fabrication
d'un appareil concurrent.
Ironiquement, l'entreprise d'ingénierie électrique
de Gray fut finalement rachetée par Bell en 1881.
Baptisée Western Electric,
elle resta le principal fournisseur d'équipements téléphoniques
aux États-Unis jusqu'à la fin du XXe siècle. Gray
poursuivit ses recherches inventives et développa en 1887 le
télégraphe, un appareil permettant de transmettre des
textes manuscrits sur de longues distances.
En échange, NBTC accepta de verser 20 % des revenus générés
par les clients Western Union acquis pendant 17 ans et de s'abstenir
d'installer des lignes télégraphiques aux États-Unis.
Western Union céda également tous ses brevets d'équipement
téléphonique à NBTC et autorisa l'installation
de lignes téléphoniques le long de ses lignes (tout en
conservant le droit d'utiliser le téléphone au sein de
l'entreprise).
L'accord à l'amiable mit fin au litige. C'est ainsi que David,
c'est-à-dire la jeune entreprise aux ressources modestes de Bell,
triompha du géant des affaires Western Union.
sommaire
Circulaire, 19 février 1879 BREVETS TÉLÉPHONIQUES.
Bureau exécutif, American Speaking Telephone Company, Western
Union Building. New York,
19 février 1879. À L'ATTENTION DU PUBLIC :
La Bell Telephone Company, cherchant à échapper aux
conséquences désastreuses pour ses intérêts
de la redélivrance à M. Gray de certains brevets d'invention
bien antérieurs à ceux délivrés à
M. Bell pour des téléphones parlants, a publié
une circulaire publique contenant tellement d'affirmations inexactes
ou hors de propos qu'elle justifie une réponse appropriée
de sa part.
Premièrement, la circulaire de Bell allègue
que « M. Bell a obtenu son premier brevet pour le téléphone
parlant le 7 mars 1876 ». Nous répondons que le brevet
de M. Bell de cette date ne fait aucune mention d'un téléphone
parlant. Il s'agit d'une amélioration d'un système
de télégraphie multiple, invention de même nature
générale que plusieurs inventions antérieures
brevetées par M. Gray. Dans son mémoire descriptif,
M. Bell ne fait aucune référence à la possibilité
de transmettre la parole articulée par son appareil. De plus,
l'appareil qui y est décrit n'a jamais été
un téléphone parlant et ne peut être fabriqué
tel.
Dans sa conférence donnée à Londres le 31 octobre
1877, M. Bell déclare à ce sujet que, bien que son
assistant ait déclaré « entendre un faible son
en provenance de cet appareil », il « n'a pas pu vérifier
cette affirmation ».
Deuxièmement. M. Gray, au contraire, avant
la délivrance du premier brevet de M. Bell, a inventé
un téléphone parlant efficace, dont l'appareil est
illustré dans la coupe suivante et a déposé
sa réserve, accompagnée de dessins similaires à
ladite coupe, auprès de l'Office des brevets pour la protéger,
le 14 février 1876, près d'un mois avant la délivrance
du brevet de M. Bell.
Dans le mémoire descriptif accompagnant cette réserve,
M. Gray indiquait que l'objet de son invention était de «
transmettre les sons de la voix humaine par un circuit télégraphique
et de les reproduire à l'extrémité réceptrice
de la ligne, afin que des conversations réelles puissent
être menées par des personnes éloignées
». « L'application pratique évidente de mon invention
sera de permettre à des personnes éloignées
de converser entre elles par un circuit télégraphique,
comme elles le feraient en présence l'une de l'autre, ou
par un tube parlant.»
Troisièmement. Concernant les brevets réattribués
à M. Gray le 28 janvier 1879, la circulaire Bell stipule
que « rien ne garantit que l'appareil décrit puisse
être utilisé pour la transmission de la parole, et
la société ne peut, en vertu de ces réattributions,
accorder la moindre protection à ceux qui contreviennent
aux brevets Bell.» À cela, nous répondons que
les brevets de Gray couvrent l'utilisation de ses appareils comme
téléphones récepteurs, ainsi que la technique
novatrice de réception de la parole par leur intermédiaire.
Aucun téléphone émetteur n'a la moindre valeur
sans un récepteur pour prendre le message à l'autre
bout de la ligne. Cette société conteste que les brevets
Bell puissent être maintenus, même s'ils couvrent l'utilisation
d'un téléphone émetteur ; cette question fait
actuellement l'objet d'un litige entre les deux sociétés
; mais, contrairement à l'invention antérieure de
M. Gray, désormais brevetée, les téléphones
Bell ne peuvent certainement pas être utilisés comme
récepteurs, et sans le droit d'utiliser un récepteur,
les appareils Bell sont totalement dénués de valeur.
La circulaire Bell précise également que « notre
avocat nous informe que les rééditions seront sans
aucun doute déclarées nulles par les tribunaux, car
elles ne concernent pas la même invention que celle couverte
par le brevet initial, et que les revendications seront interprétées
de manière à ne pas englober quoi que ce soit des
instruments fabriqués par Bell Telephone Co. ».
Nous répondons à cela que le brevet initial sur la
base duquel ces rééditions ont été accordées
était daté du 27 juillet 1875, soit huit mois avant
le premier brevet de M. Bell, mais que la demande initiale de brevet,
avec le même modèle et les mêmes dessins sur
lesquels les rééditions sont maintenant accordées,
a été déposée à l'Office des
brevets par M. Gray en juin 1874, près de deux ans avant
la délivrance du brevet de Bell ; ce modèle était
alors, et est toujours, un téléphone efficace, et
il est possible de le rendre performant pour transmettre et recevoir
de la parole articulée en dupliquant simplement l'appareil
récepteur pour en faire un émetteur. Les brevets réédités
ne décrivent donc rien et ne revendiquent rien qui n'ait
été inventé avant juin 1874 et pour lequel
aucun brevet n'aurait pu être déposé à
cette date.
Cette société est informée par un avocat aussi
éminent en droit des brevets que n'importe quel autre du
pays que les brevets ainsi réédités à
M. Gray et qu'elle contrôle désormais couvrent entièrement
les téléphones Bell et tous les autres téléphones
actuellement utilisés comme instruments de réception,
et qu'aucune communication téléphonique ne peut être
établie ou maintenue par les téléphones Bell
ou tout autre instrument actuellement utilisé sans contrevenir
auxdits brevets. La première revendication de M. Gray (dans
l'un de ces brevets, n° 8 559) est formulée ainsi : «
Je revendique comme étant ma propre invention. Le diaphragme
ou disque de métal, capable de réagir à toutes
sortes de sons, vibrant à l'unisson avec l'électromagnéto
inclus dans le circuit électrique, sensiblement comme indiqué.
Tout téléphone magnétique, qu'il soit émetteur
ou récepteur, doit contenir un électro-aimant à
diaphragme avec lequel il vibre à l'unisson et, en fonctionnement,
être intégré à un circuit électrique.
Chacune de ces conditions se retrouve dans les téléphones
Bell et leur combinaison est indispensable.
Quatrièmement. Concernant les poursuites, cette
société a intenté une action en contrefaçon
de ces brevets contre M. Williams, de Boston, réputé
être le seul fabricant des téléphones Bell,
ainsi que contre la New England Telephone Co., de Boston, agent
exclusif des téléphones Bell dans les États
de la Nouvelle-Angleterre.
Elle a ainsi mis en cause la Bell Company, dans l'État où
elle a été constituée et dans la ville où
elle a son siège, afin de réfuter la validité
et le caractère dominant des inventions brevetées
qu'elle détient. Elle a également intenté une
action similaire contre la loi. Telegraph Company of New York, principaux
utilisateurs des téléphones Bell dans cette ville.
Ces poursuites seront engagées dans les plus brefs délais.
D'autres poursuites contre des utilisateurs de téléphones
Bell, dans d'autres villes, sont en préparation et seront
engagées sans délai.
Cinquièmement. Les déclarations de la
circulaire Bell concernant des passages du livre de M. Prescott,
le récit du professeur Watson sur les événements
du Centenaire, les propos rapportés de M. Gray lors d'une
conférence à Chicago et les actions de la Western
Electric Manufacturing Co. en tant qu'agents de la Bell Telephone
Co. concernent toutes des questions totalement étrangères
au litige en cours entre cette société et Bell Company,
à savoir à laquelle des deux appartiennent les inventions
majeures du téléphone parlant.
Le téléphone à carbone Edison, supérieur
à tous les autres téléphones en usage, est
la propriété incontestée de cette société
et peut être utilisé par le public, sous son autorité,
sans même craindre de menaces de contrefaçon de la
part d'autres parties. Tous les téléphones utilisés
comme appareils de réception sont s'agit d'une violation
des brevets de M. Gray et sera poursuivi en justice à ce
titre.
THE AMERICAN SPEAKING TELEPHONE CO.
Par George Walker, PRÉSIDENT. |
sommaire
Revenons plus en détail sur la confrontation Western Union
et Bell Company :
La construction du téléphone de Bell était
relativement simple, malgré la complexité du principe
scientifique qui le sous-tendait,
Par conséquent, plusieurs entreprises ont vu le jour, tentant
ponctuellement de répondre à la demande de téléphones
en fournissant des composants et des instructions permettant à
chacun de créer son propre modèle fonctionnel.
Dès 1877, C. E. Jones & Brother de Cincinnati, fabricants
et revendeurs d'équipements électriques et télégraphiques,
annonçaient comment construire des téléphones et
proposaient un ensemble complet de pièces détachées
pour 5 $. L'entreprise a reconnu sa dette envers Alexander Graham Bell
: « Le principe du téléphone est très ancien,
mais son application a été inventée et brevetée
par A.G. Bell de Boston. ».
Néanmoins, Hubbard déposa une plainte en novembre 1878
et l'affaire fut finalement réglée au nom des intérêts
de Bell au début de 1879.
Une autre infraction précoce fut celle de L. G. Tillotson Co.
de New York.
Contrairement à l'affaire Jones, l'affaire Tillotson fut réglée
relativement rapidement et à l'amiable. Tillotson a proposé
des composants ayant la forme exacte de ceux des modèles Bell
et a décrit leur méthode d'assemblage, en utilisant même
une illustration de la Bell Company.
Charles Cheever a appelé à une action juridique, arguant
que « chaque jour, le retard ébranle la confiance du public
quant à notre force et fait de nous de nouveaux ennemis ».
Le comportement de Tillotson résultait apparemment d'un malentendu.
Après avoir été informé et avoir obtenu
des explications sur les droits de Bell, il a cessé ses activités
illicites. Il a affirmé n'avoir eu aucune intention de mal agir
et a exprimé ses regrets « à maintes reprises ».
Sous la direction du conseiller juridique de Bell Company, Tillotson
and Company a rédigé une lettre d'excuses publiques. Dans
cette lettre, l'entreprise annonçait avoir cessé la vente
de composants et demandait à ses clients de restituer les téléphones
précédemment vendus et d'être remboursés.
Tillotson a proposé de faire tout son possible pour indemniser
la Bell Company.
Malheureusement, tous ces concurrents n'ont pas pu être traités
aussi rapidement et efficacement. D'autres ont nécessité
du temps, de la patience et de l'argent. Parmi eux, le plus important
était Western Union, qui représentait la plus grande
menace concurrentielle pour les intérêts de Bell.
La Western Union Telegraph Company a été la première
à être alertée des possibilités dune
invention téléphonique dans le cadre de ses recherches
sur la télégraphie harmonique. En juillet 1875, le président
William Orton a présenté à Thomas Edison un résumé
d'un rapport sur l'invention de Philip Reis, précurseur du téléphone.
Au printemps 1876, la Western Union versait à Edison une rémunération
mensuelle de 500 dollars pour effectuer des recherches sur le «
télégraphe parlant ».
Lorsque les détails du téléphone de Bell furent
rendus publics, Edison retourna à l'un de ses propres modèles
et découvrit qu'il était également capable de transmettre
des sons, bien que très faiblement. Edison pensait que sa mauvaise
audition l'avait empêché d'entendre les sons indistinctement.
Il écrivit plus tard : « Lorsque Bell a eu cette idée
de téléphone, jai essayé de la modifier et
le son qui sortait de linstrument était si faible que je
ne pouvais pas lentendre. »
Selon Matthew Josephson, biographe dEdison, Edison a reconnu avoir
été largement dépassé et a continué
à améliorer le téléphone, apportant ainsi
sa propre contribution. En effet, les améliorations téléphoniques
dEdison allaient constituer une menace très sérieuse
pour la société Bell.
La décision de la Western Union de se lancer dans le commerce
téléphonique a amené un adversaire redoutable dans
ce domaine : la Western Union Telegraph Company, puissante et riche.
En 1876, année de la création de la Bell Patent Association,
le capital de la Western Union s'élevait à 41 073 410
dollars. Ses recettes brutes pour l'exercice 1876 s'élevaient
à 10 034 983,66 $ et son bénéfice net à
3 399 509,97 $.4 L'année suivante, lorsque Western Union s'est
inquiétée des effets possibles du téléphone,
son bénéfice net a légèrement diminué,
reflétant une réduction du taux moyen de transmission.
Elles s'élevaient à 3 140 127,67 $. Néanmoins,
la Western Union possédait d'importantes ressources financières,
comparées à celles de Bell Int'l en difficulté.
Western Union s'est officiellement lancée dans le secteur du
téléphone en novembre 1877, avec la signature d'un protocole
d'accord entre la Harmonic Telegraph Company et la Gold and Stock Company
pour le développement et l'introduction du téléphone.
La Harmonic Telegraph Company avait été créée
en mai 1876 pour développer et exploiter les inventions d'Elisha
Gray. La Gold and Stock Company exploite un système de télégraphie
de données qui transmet diverses informations financières
de la chambre de compensation de New York aux banques et institutions
financières abonnées. La Gold and Stock Company avait
un capital de 2 500 000 $, dont près de la moitié appartenait
à la Western Union. En réalité, la Gold and Stock
Company était une filiale de la Western Union.
Selon les termes du protocole d'accord, repris dans les articles officiels
de l'accord du 22 décembre 1877, l'Harmonic Telegraph Company
et la Gold and Stock Company ont convenu de créer l'American
Speaking Telephone Company avec un capital de 300 000 $, dont les deux
tiers des actions devait être émis à la Gold and
Stock et un tiers à la Harmonic Telegraph Company.
La Harmonic Telegraph Company a cédé les inventions téléphoniques
d'Elisha Gray à l'American Speaking Telephone Company. (AST)
Il s'agissait de dix lettres de brevet datées du 20 juillet 1875
au 28 août 1877, et comprenant un « émetteur (et
récepteur) pour télégraphe électro-harmonique
» et un « disjoncteur automatique pour télégraphes
électro-harmoniques à impression. »
La Gold and Stock Company a cédé à l'American Speaking
Telephone Company toutes ses inventions téléphoniques
actuelles et futures, principalement celles qu'elle avait acquises auprès
d'Amos Dolbear. Dolbear, revendiquant la priorité d'invention,
accepta en septembre 1877 de déposer des brevets sur ses inventions
téléphoniques et de les céder à la Gold
and Stock Company, qui devait prendre en charge les frais juridiques
et les dépenses d'obtention desdits brevets. La Gold and Stock
Company et l'Harmonic Telegraph Company convinrent que toute future
invention téléphonique qu'elles pourraient acquérir
serait également cédée à l'American Company.
La "Société de Téléphone Parlant"
a, à son tour, cédé à la "Société
d'Or et d'Actions" le « droit exclusif de fabriquer, d'utiliser,
de vendre, de louer ou de concéder sous licence à des
tiers » les inventions téléphoniques précédemment
acquises. Les conditions devaient être fixées par l'American
Company. La Société d'Or et d'Actions est ainsi devenue
l'agent exclusif de l'American Speaking Telephone Company. La Société
d'Or et d'Actions était tenue d'avancer les fonds et de fournir
les garanties. identifier les moyens et les installations nécessaires
à laccomplissement de ses tâches.
Il était prévu qu'elle avance des fonds pour l'obtention
de brevets et pour la poursuite et la défense des poursuites
jugées nécessaires par les administrateurs de l'American
Company, pour la protection et le développement de l'entreprise.
Les droits de l'Or et des Actions se limitaient à la fabrication,
à la vente, à la location et à l'octroi de licences
pour la fabrication et la vente d'instruments téléphoniques.
Ils n'incluaient pas la construction, la location, la vente ou l'entretien
des lignes télégraphiques sur lesquelles ces instruments
devaient être placés. Il est important de noter que les
articles de l'accord contenaient une disposition selon laquelle il était
entendu et convenu que, chaque fois que des téléphones
étaient raccordés à une ligne existante appartenant
à la Gold and Stock Company, le loyer de la ligne ne devait pas
être augmenté au-delà du loyer fixé par l'American
Corporation pour le téléphone. Lorsque les lignes téléphoniques
furent érigées exclusivement, leur longueur ne devait
pas dépasser celle de lignes similaires sur lesquelles seuls
trois instruments télégraphiques étaient fixés.
Cette disposition semble avoir été destinée à
assurer la parité des tarifs téléphoniques avec
ceux de Gold and Stock. Le protocole d'accord et les articles de l'accord
conclus stipulaient que les souscripteurs admettraient les titulaires
des brevets de Bell Telephone. Les titulaires de brevets de Bell pourraient
acquérir un droit de vote d'un quart dans l'American Speaking
Telephone Company. Naturellement, ils devraient accepter les mêmes
conditions que les autres abonnés et, ce faisant, renonceraient
à leur droit d'exercer directement l'activité téléphonique,
puisque Gold and Stock était l'agent unique et exclusif d'AST
Co.
Les articles de l'accord devaient rester en vigueur pendant vingt ans.
La Western Union n'était signataire ni du Mémorandum ni
des articles de l'accord et, par conséquent, techniquement, n'était
pas impliquée. Bien sûr, il était clair dès
le départ pour toutes les parties concernées que la Western
Union avait un intérêt dans le succès de l'American
Company et qu'elle jouait en fait un rôle directeur dans ses activités
par l'intermédiaire de la Gold and Stock Company. Les progrès
d'Edison dans le perfectionnement du téléphone améliorèrent
les chances de succès des concurrents de la Bell Company. En
mars 1877, Edison avait obtenu des fonds supplémentaires de la
Western Union et envisageait désormais l'utilisation d'un transmetteur
à piles utilisant certains des principes du microphone. Un mois
plus tard, il déposait son premier brevet pour un téléphone.
Ainsi, l'« American Speaking Telephone Company (AST) »,
et par son intermédiaire la Western Union, était prête
à affronter la Bell Telephone Company dans sa lutte pour la suprématie
dans le domaine de la téléphonie. Non seulement l'AST
possédait des droits de propriété sur les revendications
de priorité de nombreux inventeurs, mais elle comptait également
parmi ses collaborateurs l'un des plus grands inventeurs américains
dans le domaine de la téléphonie. Par-dessus tout, la
société AST était solidement soutenue par les ressources
de la Gold & Stock-Western Union.
Les efforts des détenteurs de brevets Bell pour résoudre
les conflits de revendications de brevets ont commencé dès
le 18 janvier 1877, lorsque Hubbard a indiqué qu'il était
prêt à un compromis avec Elisha Gray sur les interférences
du télégraphe harmonique. Selon l'avocat de Gray, V. D.
Baldwin, Hubbard abandonna l'idée d'unifier la théorie
de Bell et les compétences pratiques de Gray. La suggestion de
Hubbard resta lettre morte, et le litige concernant les inventions du
télégraphe harmonique continua d'inquiéter les
titulaires de brevets de Bell, et ce d'autant plus qu'il était
lié à la lutte pour la Western Union.
Avant la création de la société AST, et alors qu'il
négociait avec la Western Union, Elisha Gray proposait un compromis
avec les intérêts de Bell. Utilisant Charles A. Cheever
comme principal interlocuteur, Gray suggéra aux titulaires de
brevets Bell d'échanger leurs revendications sur le télégraphe
harmonique contre celles de Gray sur le téléphone. Pour
renforcer sa position de négociation, Gray ajouta que ses revendications
téléphoniques couvraient celles d'Edison.
Pendant que Gray négociait avec les titulaires de brevets Bell,
la Western Union cherchait également un arrangement avec eux.
Elle souhaitait soit créer une grande entreprise qui contrôlerait
divers intérêts concurrents, soit gérer l'activité
téléphonique en partenariat avec les intérêts
Bell. Gray finira par rejoindre la Western Union pour créer la
société AST, mais en attendant, il poursuivra des négociations
séparées avec Gardiner C.
Hubbard. Cheever informa Gray de la volonté de Hubbard de «
faire un sacrifice » et lui fit confiance pour sa disposition.
Sous réserve de l'approbation d'Alexander Graham Bell, Hubbard
accepta d'échanger les droits harmoniques de Bell contre ceux
de Gray en matière téléphonique. De plus, il souhaitait
que le procédé télégraphique autographique
de Bell soit protégé. Hubbard souhaitait qu'il soit clairement
entendu que l'accord précédent n'était conclu qu'à
la condition que vous, Gray, disposiez, auprès de l'Office des
brevets ou autrement, de revendications antérieures couvrant
les revendications d'Edison sur l'invention du téléphone
telle qu'elle est actuellement formulée par lui, et bien entendu,
couvrant toutes les revendications similaires qui existent actuellement
ou qui le seront à l'avenir, et qui peuvent être tentées
de la même manière par quiconque.
En septembre 1877, Gray avait autorisé le président
de la Western Union, Grton, à négocier en son nom. George
Walker, vice-président de la Gold and Stock Company, transmit
cette information à Charles Cheever, ainsi que le fait que la
Western Union contrôlait également les inventions d'Edison
et de Dolbear. Malgré tout, Walker était disposé
à un compromis avec Bell Company si ses instruments fonctionnaient
de manière satisfaisante, car la politique de G&S était
de n'avoir aucun rival dans ce domaine digne d'être considéré
comme un concurrent.
Alors que les deux parties réclamaient un compromis, l'avocat
en brevets de Bell, Anthony Pollok, a fait valoir que les brevets de
Bell étaient suffisamment solides pour être utilisés
indépendamment et qu'il n'était donc pas enclin à
recommander un compromis impliquant un grand sacrifice pour les intérêts
de Bell. Il a préconisé une action en justice contre toute
contrefaçon dès qu'il y aurait des preuves tangibles pour
la justifier.
Pollok a vivement approuvé le recrutement par la société
de l'éminent avocat Edward N. Dickerson, dont l'opinion, pensait-il,
aurait beaucoup de poids auprès du syndicat des démocrates.
Les détenteurs de brevets Bell semblaient accorder une grande
confiance à la sécurisation des services juridiques clés
susceptibles d'influencer la Western Union. En août, Hubbard avait
tenté d'engager W. D. Baldwin, l'avocat de Gray, pour représenter
les intérêts de Bell contre d'autres parties que Gray.
Pendant la création de l'American Speaking Telephone Company,
le président Orton, agissant par l'intermédiaire d'un
tiers, proposa de créer une société avec un quart
d'intérêt pour Bell et Gray et un demi-intérêt
pour la Vfestern Union, représentant Edison et d'autres. Western
Union a proposé de fournir tous les capitaux nécessaires
et a offert des facilités pour une introduction plus large des
téléphones et une protection adéquate de l'entreprise.
Cheever répondit à l'émissaire d'Orton que tout
arrangement concernant le « Téléphone parlant »
devrait inclure l'« Harmonic », car celui-ci possédait
des caractéristiques couvrant les revendications d'Edison et
celles d'autres contrevenants présents et futurs.
Cheever exhorta Hubbard à un compromis si la Western Union concluait
un arrangement « équitable ». Il appréciait
le fait que les litiges réduiraient le nombre d'instruments pouvant
être loués et mis en vente, ce qui se traduirait par une
location plus faible, une condition hautement indésirable en
période de lutte concurrentielle.
Pendant qu'Orton faisait son offre à la Bell Company, Hubbard
envisageait une consolidation d'intérêts avec l'American
District Telegraph Company et Elisha Gray. Les titulaires de brevets
Bell recevraient trois quarts d'intérêt et Gray un quart
d'intérêt dans le cadre du théâtre, tandis
que Gray recevrait trois quarts d'intérêt et Bell un quart
d'intérêt dans les instruments Harmonic. Le 21 novembre,
quatre jours après la signature du mémorandum créant
l'American Speaking Telephone Company, Elisha Gray sollicita une conférence
avec la Bell Company afin de régler définitivement la
question d'une alliance ou d'un combat. Prétextant n'avoir pas
encore conclu d'accord avec la Western Union, il accepta, « au
nom de la paix », un arrangement portant à la fois sur
le télégraphe harmonique et le téléphone.
Lorsque Cheever proposa un compromis excluant la Western Union, Gray
refusa.
En décembre, Gray informa Cheever de l'achèvement de la
création de l'American Speaking Telephone Company.
Il réitéra l'offre d'un quart de participation aux titulaires
de brevets Bell. La Western Union devait apporter la totalité
des fonds, tandis que la Gold and Stock se chargerait de tout le travail
et assumerait la direction de l'activité téléphonique,
sous la responsabilité de l'American Company. Gray se montra
disposé à envisager un arrangement avec la Bell Company
pour les inventions harmoniques, mais les chances réelles d'un
compromis séparé s'achevèrent avec la création
de l'American Company.
Rétrospectivement, il semble que Gray n'ait pas été
entièrement honnête dans ses relations avec la Bell Company.
Il prétendit n'avoir conclu aucun accord avec la Western Union,
alors qu'il en avait conclu un. Une déclaration de Gray en octobre
1877 vient également étayer ce point de vue :
"J'ai en poche une proposition du groupe Bell visant à me
racheter le téléphone parlant et à abandonner simultanément
toute prétention sur la fonction télégraphique
multiple. La priorité a fait l'objet de nombreuses discussions
entre différentes parties. Ils tiraient sur les cornes et la
queue pendant que je trayais tranquillement la vache. Gray avait déjà
remarqué qu'il était très occupé à
équiper les lignes télégraphiques de téléphones.
Je savais qu'elle était à moi et tant que je la possédais,
peu importait que les autres se disputent".
Bien que Charles Cheever continuât de prôner un compromis
pacifique, Hubbard commença à s'y opposer vers la fin
de 1877. Il pensait que la Bell Company se renforçait de jour
en jour et serait bientôt en mesure de vaincre ses ennemis. Il
concéda une tendance à l'excès de sincérité,
mais ajouta : « Je ne crois pas que la WU Tel Co. possède
une organisation capable d'accomplir grand-chose ; l'argent n'est en
aucun cas le plus important ; il faut du jugement, de l'énergie
et de l'esprit d'entreprise. » Hubbard était soutenu par
Thomas Watson, qui considérait la création de l'American
Speaking Telephone Company et son offre à la Bell Company comme
une simple étape supplémentaire dans la « politique
de destruction » de la Western Union. Il ne pensait pas que les
brevets de Bell gagneraient en valeur s'ils étaient fusionnés
avec la Western Union.
En fait, Watson était certain que si la Western Union avait contrôlé
les brevets dès le départ, le nombre de téléphones
actuellement en service ne serait pas dix fois inférieur. Watson
concluait : « Je ne sais pas où nous allons trouver l'argent
pour lutter, mais je suis prêt à sacrifier mes chances
de gagner de l'argent avec le téléphone plutôt que
de me soumettre à une telle imposition. »
En revanche, Thomas Sanders était d'avis qu'« il est de
la plus haute importance que nous prenions toutes les mesures possibles
pour éviter un procès, tout en préservant nos droits.
» L'attitude plus prudente de Sanders reflétait son important
investissement dans la société Bell.
Watson avait moins à perdre et pouvait donc se permettre d'être
plus audacieux.
Bien que Sanders considérait la proposition d'un quart des parts
de l'American Company comme injuste, il estimait que le syndicat des
commerçants était prêt à en proposer une
plus avantageuse. Les revendications de Bell étaient certes les
plus solides, mais il refusait d'engager un procès interminable
contre une puissante entreprise. Cela aurait probablement anéanti
tous les bénéfices de Bell Telephone Company, voire empêché
toute perception de loyers pendant cinq ou six ans, obligeant ainsi
l'entreprise à épuiser toutes ses ressources avant de
percevoir ses droits, si tant est qu'elle les perçoive. Sanders
exhorta donc l'entreprise à proposer les meilleures conditions
possibles à « cette puissante corporation ».
Sanders proposa que la Western Union crée une société
de 52 000 000 d'actions, dont la Bell Company recevrait un quart ou
plus d'actions, et sur laquelle la Western Union garantirait un dividende
minimum de 7 %.
La Bell Company, estimait-il, avait droit à l'intégralité
des bénéfices de tout ce qu'elle avait déjà
accompli, et la nouvelle société, qui s'appellerait également
Bell Company, devrait embaucher tous les agents actuels recommandés
par les intérêts de Bell. Enfin, Sanders insista pour qu'un
accord soit conclu avec Elisha Gray, par lequel la Bell Company deviendrait
copropriétaire des brevets Harmonic. Sanders rappela à
Hubbard :
J'espère que vous ne voyez pas l'intérêt d'un compromis,
car je pense que ce serait judicieux même si leurs arguments étaient
plus faibles, car une bagarre est ruineuse, s'ils sont déterminés
à en avoir une, et il semble qu'ils le soient.
Sanders fut acclamé quelques jours plus tard lorsque George L.
Bradley a indiqué avoir obtenu les 50 000 dollars promis pour
le financement de la New England Telephone Company. De plus, les avocats
de Bell ont indiqué que l'opposition ne pouvait pas s'ingérer
dans la location de téléphones de la compagnie et ainsi
bloquer ses revenus. Sanders a alors soutenu une lutte si la compagnie
pouvait être assurée d'être approvisionnée
en « nerfs de la guerre », mais a insisté pour qu'elle
soit retardée le plus longtemps possible.
Il ne fait aucun doute que Hubbard, Sanders et d'autres étaient
confortés dans leur croyance en la suprématie de la Bell
Company par l'existence d'un certain sentiment anti-Western Union dans
les milieux d'affaires. Un représentant du Pennsylvania Railroad
fit part du souhait de son entreprise de voir la Bell Company triompher
dans sa lutte téléphonique contre la Western Union.
À ce stade des négociations, chaque entreprise tenta de
présenter l'autre comme plus disposée au compromis. Thomas
Cornish informa Hubbard que la Western Union faisait circuler l'information
selon laquelle la Bell Telephone Company souhaitait ardemment se joindre
à elle, mais que la Western Union ne le permettrait pas. La Western
Union se vantait également que les instruments de la Bell Company
appartiendraient bientôt au passé. Hubbard, de son côté,
affirma que c'était la Western Union qui souhaitait s'unir à
la Bell Telephone Company et que c'était la Bell Company qui
avait « décliné l'invitation ». Les avocats
de Bell restèrent convaincus que les brevets et les revendications
de Bell étaient invincibles. Pollok et Dickerson s'accordèrent
à dire que la Bell Company n'avait rien à craindre d'un
procès avec Western Union. Ce ne serait ni long ni coûteux.
Une nouvelle phase de négociations s'engagea à la mi-janvier
1878, caractérisée par une plus grande volonté
des intérêts de Bell d'engager une action en justice. «
Lorsqu'Elisha Gray rendit visite à Charles Cheever, ce dernier
fut informé qu'au vu des démarches entreprises par ses
bailleurs de fonds, la Bell Company se trouvait désormais dans
une situation où il lui était impossible de faire la moindre
proposition.» Néanmoins, la Bell Company était intéressée
par un règlement à condition qu'il soit équitable
et qu'il émane de l'autorité compétente et sous
une forme précise. La Bell Company n'examinerait aucune nouvelle
proposition. La Western Union comprenait les idées générales
des titulaires de brevets Bell et une offre fondée sur celles-ci
serait considérée comme acceptable. La Bell Company rejeta
tout arrangement basé sur une participation d'un quart dans la
société AST.
À la même époque, Cheever commença à
signaler, sur la base de discussions avec William Orton et Norvin Green,
président et vice-président de la Western Union, que l'opposition
semblait plus encline à négocier un règlement.
Il fut impressionné par les projets de Western Union visant à
étendre considérablement l'introduction du téléphone.
« Leurs idées sur l'utilisation du téléphone
et le nombre de numéros qui seront introduits dépassent,
selon eux, de loin les limites de nos rêves les plus fous. »
(Peut-être Cheever était-il si impressionné qu'il
imaginait une plus grande volonté de compromis de la part de
Western Union.) Orton et Green avaient tous deux beaucoup à dire
sur le coût du litige, et tous deux furent impressionnés
par la décision de Dickerson de rejoindre la Bell Telephone Company.
» Cheever conclut : « En un mot, la situation est bien plus
exagérée dans tous les détails, telle qu'ils la
perçoivent, que telle que nous la percevons.
Les deux parties exagérèrent leurs propres arguments.
Orton expliqua à Cheever que la Western Union prévoyait
d'installer un ensemble de téléphones fonctionnels dans
chaque bureau de la Western Union [7500] et que la compagnie envisageait
d'établir des antennes dans les magasins de campagne et les bureaux
de poste, puis de les relier aux bureaux principaux de la Western Union
par téléphone. Cheever informa Green que la Bell Telephone
Company était prête à céder plusieurs centaines
de milliers de téléphones, dont le coût ne dépasserait
pas un dollar et demi à deux dollars pièce. Cheever conclut
de ses négociations que, malgré les objections de la Western
Union, elle garantirait un dividende, même de sept pour cent,
sur les actions émises à la Bell Telephone Company. «
Compte tenu de la taille et du nombre indéniables des canons
dont ils disposent et de la résistance ruineuse qu'ils peuvent
sans aucun doute opposer au combat », Cheever proposa la création
d'une société dotée d'un capital de 3 000 000 $,
qui serait réparti entre les différents groupes téléphoniques.
Cette société devait verser aux titulaires de brevets
Bell une redevance d'un dollar par an sur chaque téléphone
loué et garantir, au bout d'un an, une redevance sur au moins
vingt-cinq mille postes téléphoniques. » De plus,
Cheever a demandé une garantie absolue que les intérêts
de Bell bénéficieraient d'une représentation fixe
au sein du conseil d'administration, qui, conformément aux statuts
de la société, aurait le pouvoir d'opposer son veto à
toute proposition. Étant donné que la Western Union prévoyait
l'intégration possible de la société Bell dans
son réseau téléphonique consolidé, et aussi
parce que la Western Union n'avait pas encore loué de téléphone,
Sanders pensait que la Western Union ne voulait pas se battre, mais
était en fait prête à offrir aux brevets Bell tous
ceux qu'elle pouvait raisonnablement demander. Il a donc insisté
sur la proposition prévoyant l'émission d'un bloc d'actions
qui acquerrait immédiatement une valeur marchande grâce
à un dividende garanti par Western Union. Sanders a interprété
l'opposition de Hubbard à cette approche comme étant le
résultat de leurs tempéraments différenciés
:
"Je crains que cela n'ait pas assez de poids à vos yeux,
car « un tiens vaut mieux que deux tu l'auras » ne semble
pas faire partie de vos maximes, à condition que l'avenir indéfini
soit radieux, et que le présent semble ne pas vous importer beaucoup.
Vous avez un certain mépris pour l'argent. Un atout enviable,
mais guère souhaitable pour un partenaire commercial. C'est pourquoi
je me sens justifié de vous le rappeler afin que vous réalisiez
l'importance de sécuriser immédiatement une situation
solide, laissant l'avenir se construire de lui-même".
En sécurisant une situation solide, les défenseurs ne
voulaient pas dire que les détenteurs de brevets devaient sacrifier
leurs perspectives d'avenir, mais plutôt qu'ils devaient être
prêts à en faire un profit substantiel à ceux qui
les avaient placés sur cette base.
Ainsi, les défenseurs se sont opposés à un procès
ou à une lutte concurrentielle.
Il conclut qu'il serait impossible pour la compagnie Bell de parvenir
à un compromis satisfaisant avec la Western Union.
Il y avait donc deux alternatives : soit vendre l'intégralité
du téléphone à la Western Union (en protégeant
les agents de Bell autant que possibl e), soit vendre le droit exclusif
d'utiliser le téléphone à certaines fins spécifiques
à la Western Union.
Sanders estimait que les détenteurs de brevets Bell ne pouvaient
agir de concert avec la Western Union, car cela signifierait la fin
de la compagnie de téléphone Bell. Il suggérait
qu'il existait une « belle affaire » en dehors des intérêts
de la Western Union et que la compagnie Bell pourrait peut-être
conclure un accord commercial lui réservant le droit de propriété
sur les lignes téléphoniques privées, sans interférence
avec la Western Union.
Dans ses Instructions aux agents n° 3 du 1er février 1878,
la compagnie Bell a informé ses agents qu'un avocat éminent
avait été retenu et que des poursuites seraient engagées
contre tous les contrevenants.
La compagnie Bell a tenu pour acquis que les tribunaux autoriseraient
des injonctions, après quoi les contrevenants seraient contraints
de lui payer des loyers. Malgré cette annonce, Cheever a réaffirmé
la proposition de la Bell Company à la Western Union. La proposition
était essentiellement la même que son plan du 25 janvier,
sauf qu'elle prévoyait désormais la création d'une
société de 2 000 000 $, dont la moitié des actions
reviendrait à la Bell Company, et que la garantie pour la première
année était portée à 30 000 instruments
et à 60 000 pour la deuxième année. Cette proposition
plus agressive reflétait en partie le conseil de Chauncy Smith
selon lequel la compagnie de téléphone Bell devait assumer
la position selon laquelle elle était la seule entreprise à
posséder quelque chose de valeur et que tout ce qu'elle désirait
de la Western Union était son amitié plutôt que
son opposition. Il a également recommandé de laisser la
Western Union proposer ce qu'elle souhaitait et le montant qu'elle allait
offrir. Si une consolidation était proposée, la Western
Union devait démontrer ce qu'elle possédait et l'autoriser
à se soumettre à un contrôle.
En général, Smith conseilla à la compagnie Bell
de « se retenir et de les laisser parler et montrer leur jeu
sans jamais admettre qu'ils possèdent quoi que ce soit de valeur
sauf leur amitié.»
Après avoir consulté Gardiner Hubbard, Cheever envoya,
le 4 février, une proposition officielle à Norvin Green
pour la fusion des intérêts téléphoniques
conflictuels. Cheever a réaffirmé que Bell était
l'inventeur initial du téléphone et que tous les autres
fabricants de téléphones étaient des contrevenants
qui seraient presque certainement considérés comme tels
par les tribunaux. Il a reconnu que Western Union n'était pas
d'accord avec cette interprétation, mais a attribué cela
au fait que l'avocat de Western Union ne disposait pas de tous les éléments
du dossier. Cheever a exprimé sa volonté de conclure un
accord, car la société Bell reconnaissait les importantes
facilités offertes par le syndicat des femmes et était
consciente des dépenses importantes qu'impliquait nécessairement
ce litige, sans compter l'effet démoralisant que cela pouvait
avoir sur les clients de Bell.
En conséquence, Cheever a proposé une garantie d'un dollar
sur les téléphones. Ce chiffre est basé sur le
fait que les téléphones fabriqués et loués
au cours des cinq derniers mois rapportaient un loyer annuel de 30 000
$.
En cédant ses activités à la Western Union, la
compagnie de téléphone Bell s'attendait à recevoir
une somme au moins égale à ce qu'elle gagnerait si elle
conservait ces activités. Cheever a appelé à une
action rapide, soulignant que Hubbard négociait pour 50 000 $
afin d'engager des poursuites. Après avoir rédigé
ces propositions, Cheever a ajouté plusieurs dispositions sur
les instructions de Gardiner Hubbard.
Ces dispositions soulignaient que la Bell Telephone Company était
la seule à posséder des brevets pour les téléphones,
et que si la Western Union louait des téléphones avant
de recevoir des brevets, elle devait nécessairement apparaître
comme un contrefacteur et ne serait pas disposée à attendre
la décision de l'Office des brevets auprès duquel elle
avait fait appel. De plus, une décision contre les brevets de
Bell ne ferait qu'empêcher la société Bell de réaliser
des bénéfices anticipés, tandis qu'une décision
contre Western Union paralyserait ses activités télégraphiques
privées et régionales.
Hubbard, par l'intermédiaire de Cheever, a menacé de conclure
un accord avec d'autres sociétés télégraphiques
du pays, à moins qu'un accord ne soit trouvé. Cheever
a également plaidé pour un règlement à l'amiable
en soulignant que la société Bell possédait trois
années d'expérience précieuse et qu'il était
peu probable que Western Union puisse acquérir la même
expérience dans un délai plus court. Il a expliqué
:
"Nous avons l'expérience commerciale, les brevets, le revenu
net et les fonds nécessaires au maintien de nos brevets. La Western
Union possède ses propres lignes, son capital et des machines
non développées, basées sur des revendications
non fondées contre notre brevet".
Les instructions de Hubbard à Cheever exigeaient une garantie
sur au moins 4 000 instruments la première année et 30
000 la deuxième année.
Cheever a ignoré les chiffres de Hubbard afin de les rendre suffisamment
élevés pour pouvoir être revus à la baisse
si nécessaire. Hubbard a demandé qu'au moins deux représentants
de Bell soient nommés au Conseil exécutif et qu'ils en
assument la présidence si la Western Union contrôlait les
finances. Sanders a répondu favorablement à la dernière
proposition de Hubbard, bien qu'il n'ait pas approuvé que la
Western Union révèle le montant que la Bell Company pourrait
lever. Il estimait qu'il valait mieux faire étalage de ses ressources
illimitées plutôt que de révéler des informations
et de donner lieu à une éventuelle révélation
de la situation financière de l'entreprise. Cinquante mille dollars
« sembleraient un peu fragile » à Western Union.
Sanders a vivement encouragé à essayer d'obtenir un demi-million
de dollars d'actions garanties à sept pour cent. Il a approuvé
la candidature de Hubbard à la présidence, notant :
Compte tenu de ce que vous avez fait, vos revendications méritent
certainement dêtre prises en considération et vous
pouvez compter sur moi pour les faire valoir dans la mesure de mes capacités.
Bien sûr, cependant, je suppose que vous navez pas lintention
de faire une remarque en votre nom.
Cheever était favorable à une demande de redevances sur
la base du montant proposé plutôt que d'une garantie de
sept pour cent, estimant que Western Union concèderait davantage
sous cette forme. Si une redevance était accordée sur
la base de la proposition de février à Green, la société
Bell recevrait plus que sept pour cent sur la base de 500 dollars d'actions.
Admettant qu'il devrait réduire légèrement ses
prétentions, Cheever a jugé sa proposition raisonnable
compte tenu du nombre de téléphones que la société
Bell louait avec ses installations légères.
Après mûre réflexion, les comités des compagnies
Gold and Stock et American Soeaking Telephone ont déclaré
à l'unanimité qu'aucun élément de la proposition
de Cheever de février ne pouvait être accepté sans
modification. Ils estimaient que cette proposition rendait tout nouvel
effort d'accommodement inutile. Cependant, Green a maintenu l'espoir
de négociations en se déclarant prêt à rencontrer
Cheever. Cheever s'est dit choqué par le rejet de sa proposition
par Green.
Cheever espérait que l'opposition examinerait attentivement chaque
point séparément et lui ferait part de ses objections.
Une telle procédure, a-t-il soutenu, faciliterait l'harmonisation
des idées opposées. En réalité, Cheever
tentait de gagner du temps jusqu'à ce qu'Orton, absent, revienne
à New York et puisse reprendre la direction des négociations.
Cheever pensait qu'Orton était beaucoup plus libéral et
qu'il parviendrait à un meilleur accord que le vice-président
Green, car il connaissait mieux la situation et comprenait mieux la
force de la position de la Bell Company. Cheever ignorait ou n'était
pas conscient du malaise entre Orton et Hubbard.
Orton a traité la proposition de Cheever avec moins de mépris,
mais l'a tout de même rejetée. Cheever ne s'est pas découragé,
car il croyait toujours qu'Orton pouvait être persuadé.
Sanders est devenu furieux lorsqu'il a appris le contenu de l'entretien
d'Orton avec Cheever. Selon Sanders, les arguments sur lesquels Orton
fondait ses affirmations concernant Western Union étaient si
faibles que Sanders s'est senti moins disposé que jamais à
les prendre en considération. Mais Sanders était encore
moins confiant quant à la capacité de l'opposition à
considérer favorablement les affirmations de Bell. Sanders était
particulièrement contrarié par l'attitude d'Orton : «
Je ne peux m'empêcher d'être dégoûté
par un homme qui prétend traiter une affaire avec une équité
suprême, alors qu'il sait qu'il est mal représenté.
»
Conscient de son hostilité et de celle de Hubbard envers Orton,
Sanders estima que Charles Cheever devait continuer à veiller
aux intérêts de la Bell Company pendant les phases préliminaires
des négociations. De plus, Cheever était parfaitement
qualifié pour cette tâche, car il était basé
à New York, siège de la Western Union, et bénéficiait
de la confiance d'Orton. Sanders était convaincu que l'opposition
comprenait chaque jour davantage la force de la Bell Company et souhaitait
donc parvenir à un accord avec la Western Union. Sanders était
également contrarié par ce qu'il considérait comme
le « désintérêt » ou l'« indifférence
» d'Anthony Pollok et de Chauncy Smith.
La faiblesse de la situation de la Bell Company, telle que Sanders la
comprenait, résultait du « manque de liquidités
solides et stables », qui ne pouvait être assuré
que par la participation d'une grande partie des intérêts
du titulaire du brevet. Par conséquent, Sanders se demandait
s'il était préférable de partager une partie de
l'activité permanente avec les seuls adversaires de la Bell Company
plutôt que de la partager. Un intérêt avec des parties
qui ne contribueraient qu'une petite somme à un litige dont l'issue
était douteuse.
Compte tenu de la réticence de Hubbard à céder
un intérêt dans les brevets à des tiers, Sanders
était convaincu que Hubbard était d'accord avec lui. Cependant,
Sanders ne croyait pas à l'existence d'un accord concernant la
conclusion la plus rapide de ce point. Il a écrit : « Si
nous sommes contraints de porter un coup, nous révélerons
fatalement notre faiblesse, et si, après nos menaces, nous négligeons
de porter le coup, nous ne gagnerons certainement pas de terrain. »
Craignant que la compagnie Bell n'ait exagéré sa part
en formulant des exigences exorbitantes, Sanders estimait désormais
qu'elle devait se contenter de 500 000 dollars d'actions garanties et
de tout ce qu'elle pouvait obtenir. Il a appelé à la promotion
et a insisté sur le fait que les titulaires de brevets «
ne se livrent à aucun marchandage ». Bien que les craintes
de Sanders l'aient incité à abandonner ses « exigences
exorbitantes », l'opposition était moins disposée
à faire des compromis. Après avoir rencontré Orton
et Green, Cheever a conclu que la Bell Company devrait se battre un
peu avant de parvenir à un accord raisonnable. Il discerna un
« mouvement résolument rétrograde », car désormais
la Western Union n'offrait pas plus d'un quart de participation en actions
pour les brevets Bell et une garantie ne dépassant pas 20 000
$.
Même la garantie n'était pas très souhaitable sous
la forme présentée.
La Western Union ne la garantissait qu'au nom de l'American Speaking
Telephone Company, « une partie irresponsable dont la garantie
ne vaut rien ». Selon l'analyse de Cheever, la garantie n'était
rien de plus qu'un dividende privilégié de quatre pour
cent sur 500 000 $ d'actions. Hubbard lui-même nétait
désormais plus disposé à faire des compromis. Afin
de libérer la compagnie Bell du combat, il a demandé à
Cheever d'informer la Western Union de son souhait de se retirer des
négociations si elle ne parvenait pas à faire une meilleure
proposition. Cheever s'est exécuté, affirmant qu'il était
peu utile de poursuivre les négociations compte tenu de la grande
différence existant entre les deux compagnies. Apparemment, Sanders
n'était pas au courant de cette nouvelle évolution des
négociations, car il a écrit à Hubbard pour lui
demander quelle indemnisation ils demandaient au syndicat des femmes.
Il était également préoccupé par les revendications
de Gray et a suggéré que la compagnie Bell devrait savoir
exactement où en était l'affaire à Washington avant
d'engager des poursuites. Il a observé :
"Un réseau se tisse autour de nous grâce à
l'immense force de l'opposition qui ne ménage aucun effort pour
nous réduire à une position où nos revendications
seront bien moindres qu'elles ne le sont aujourd'hui, avant de faire
leur offre finale. J'ai peur que leur politique soit de retarder et
d'atteindre tous ceux qui nous sont, de quelque manière que ce
soit, tributaires de nous, par la corruption ou par tout autre moyen
de leur part, ce qui les détournerait de nous".
En réponse à la notification de Cheever, Orton considérait
les négociations comme terminées. Cependant, en raison
de la « très grande expérience » de Western
Union en matière de procédures judiciaires, l'entreprise
hésitait à les engager jusqu'à ce que cela soit
absolument nécessaire. Néanmoins, a informé Orton
à Cheever, la Western Union était préparée
à toute procédure susceptible d'être engagée
et n'avait aucune appréhension quant au résultat. Si seulement
les parties concernées pouvaient se rendre compte du coût
et du temps nécessaires à de telles activités,
elles pourraient utiliser leurs ressources plus efficacement.
La proposition finale du Western Union a été faite par
Norvin Green le 21 février 1978, le jour même où
Orton a reconnu la fin des négociations formelles. Green a fait
son offre en espérant qu'en cas d'accord avec Cheever, ils pourraient
probablement obtenir l'accord de leurs associés. C-reen a suggéré
de « partager la différence » qui existait lors de
leur dernier entretien et a offert une garantie de cinq pour cent des
actions. Green n'a pas pu aller plus loin que la Gold and Stock Company,
et il pensait qu'il aurait du mal à convaincre Gray de l'accepter.
Green a soutenu que si l'activité téléphonique
indivise se révélait à la hauteur des attentes,
les désaccords sur la garantie ne serviraient à rien puisque
« nous obtiendrions plus que cela »,
Cheever a informé Green qu'il ne croyait pas que les titulaires
de brevets accepteraient ces conditions et qu'il ne pouvait pas leur
conseiller de le faire. Cheever a également offert à Orton
plus de temps, s'il le souhaitait, avant de mettre fin à toutes
les négociations.
Cheever informa Green qu'il ne croyait pas que les titulaires de brevets
accepteraient ces conditions et qu'il ne pouvait pas leur conseiller
de le faire. Cheever offrit également à Orton plus de
temps, s'il le souhaitait, avant de mettre fin à toutes les négociations.
De ce fait, les négociations et les communications étaient
apparemment terminées.
La Bell Company envisagea alors de se battre pour conserver son emprise
sur le marché téléphonique. Sanders était
mécontent de cette perspective. Compte tenu de la situation déjà
précaire de l'entreprise, il se demandait où trouver les
fonds nécessaires pour répondre aux exigences financières
du litige. Il a suggéré que la Western Union, ou n'importe
qui d'autre, aurait donné davantage pour que la moitié
de la Bell Telephone Company possède un capital adéquat
et soit efficacement organisée que pour une entreprise entière
qu'ils considéraient comme sans stabilité ni pouvoir.
Sanders a ainsi laissé entendre qu'une grande partie du problème
de Bell Company. était due au refus de Hubbard de fournir ces
facteurs nécessaires par le biais d'une réorganisation
de l'entreprise avec de nouveaux Investisseurs.
Même si les défenseurs n'appréciaient pas cette
perspective, la Bell Company se prépara à une lutte acharnée.
Heureusement, elle put bénéficier de l'aide de la nouvelle
compagnie de téléphone britannique Hewlett-Packard.
Poussé de tous côtés, Hubbard prit des mesures pour
engager une action en justice immédiate.
En février 1878, les perspectives de victoire de la Western Union
s'étaient considérablement améliorées. Il
y avait un téléphone opérationnel. Après
l'avoir minutieusement inspecté et disséqué, Watson
a conclu :
"Il fonctionne mieux que quiconque ne l'a encore reconnu. C'est
un travail remarquable et son coût doit être plus élevé
que le nôtre. C'est bien sûr un téléphone
simple et efficace qui fonctionne aussi bien que nos mains, pas mieux".
De plus, Edison avait déjà déposé un brevet
pour son deuxième téléphone. Son téléphone
utilisait un bouton en carbone noir qui, utilisé selon le principe
de la résistance variable en conjonction avec une batterie, produisait
de forts courants de transmission. Ces caractéristiques, associées
à une bobine d'induction, promettaient d'allonger la durée
de vie utile du téléphone de plusieurs centaines de kilomètres
sur les instruments à magnéto de Bell.
Un autre facteur dans l'attitude durcie de la Western Union était
certainement l'effet résiduel de la querelle Orton-Hubbard. Étant
donné les sentiments d'Orton envers Hubbard, on ne peut que se
demander dans quelle mesure Orton était enclin à régler
de vieux griefs. Un commentaire d'Amos Dolbear, rapporté par
Thomas Watson, tend à étayer ce soupçon : «
M. Hubbard a causé des ennuis à l'Union des travailleurs
du textile (WU) et ils étaient déterminés à
s'asseoir sur lui cette fois-ci. » Ces facteurs, ainsi que ses
avantages évidents, ont sans aucun doute incité la Western
Union à rejeter ce qu'elle considérait comme des demandes
injustifiées et largement exagérées de la part
de la compagnie de téléphone Bell.
D'autre part, la compagnie Bell avait ses propres raisons de présenter
des revendications qu'elle considérait comme justifiables et
de refuser de plus en plus de compromis. La société était
convaincue qu'elle détenait le brevet de base sur la téléphonie
et que, tant qu'elle le détenait, elle était seule légalement
autorisée à exercer cette activité. Cette conviction
était renforcée par les avocats de la société,
qui ont constamment soutenu que les arguments de Bell Company étaient
très solides.
Malgré la situation financière précaire de la Bell
Company, Hubbard était convaincu que l'entreprise était
suffisamment solide pour engager le combat contre Western Union. Il
avait tendance à surestimer les avantages réels et potentiels
de l'entreprise. Par exemple, Hubbard accordait une grande confiance
à l'expérience téléphonique de la Bell Company
pour compenser les avantages de l'adversaire. Il semblait croire qu'il
serait relativement simple de créer une organisation dérivée
de la Western Union en utilisant les sociétés de télégraphie
de district existantes. Outre sa confiance illimitée, parfois
injustifiée, Hubbard était également influencé
par son hostilité de longue date envers Orton et la Western Union.
Par conséquent, la situation de la Bell Company semblait s'améliorer.
Pour s'améliorer, il était moins enclin au compromis.
En février 1878, la Western Union et la Bell Telephone Company
estimaient pouvoir remporter une lutte concurrentielle et, dans la mesure
où elles étaient convaincues de leur supériorité,
elles étaient peu disposées à faire des concessions
qui auraient pu aboutir à un compromis.
....
Lorsque la Bell Telephone Company cessa son existence
en tant qu'« association volontaire », elle s'enlisa davantage
dans le réseau de la concurrence.
Les efforts pour négocier un accord à Chicago échouèrent
tout comme ils l'avaient fait au niveau national. Ironiquement, le compromis
final incluait un principe de royauté similaire à celui
proposé à Chicago.
...
Le procès porté devant la cour itinérante des Etats-Unis
se termina par un compromis aux termes duquel la Western Union renonça
à ses intérêts dans le téléphone au
profit de l'American Bell Telephone Company, en échange d'une
participation de 20 % sur toutes les royalties et les abonnements que
celle-ci percevrait jusqu'à l'expiration des brevets. Ainsi se
termina l'intervention de la Western Union sur le marché du téléphone.
Mais pour Elisha Gray, les améliorations du téléphone
continuaient, de même que la bataille juridique pour la priorité
de l'invention.
A l'époque du compromis, en effet, Gray venait juste de réaliser
l'intérêt commercial du téléphone.
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